Entre les examens, j'ai suivi ton conseil et je me suis lu
Rêve de Fer de
Norman Spinrad, alias The Iron Dream en VO (pour une fois qu'un titre VF suit vraiment le titre VO, je veux le souligner).
C'est donc un livre avec un livre à l'intérieur, et une Postface pour expliquer plus ou moins les choses et surtout l'univers dans lequel ça se passe. En clair, le pitch est simple : après la première Guerre Mondiale, Hitler a quitté l'Europe, dégoûté, et a émigré aux Etats-Unis. Devenu auteur de SF, il livre dans les années 50 Le Seigneur du Svastika, un roman de SF démontrant toutes ses idées sous-jacentes, racistes et répugnantes avec un "purhomme" sauvant le monde d'une horde de mutants monstrueux et de Dominateurs mesquins et manipulateurs qui veulent détruire les derniers "purhommes" après une guerre nucléaire plusieurs années auparavant. C'est suivi d'une Postface assez intéressante sur le livre et sur l'analyse d'un auteur (existe-t-il, en fait ?) de cet univers sans régime Nazi sur cette histoire.
C'est donc un livre assez étrange et déroutant. Spinrad nous livre un récit écrit par Hitler, où on voit toutes ses allusions nazies et toute l'horreur de ces idées. C'est assez dérangeant de lire la montée d'un "purhomme" dans ce monde post-apocalyptique, avec toutes les allusions non cachées par Spinrad.
Il est difficile de prendre du réel plaisir à lire cette histoire, en fait, car dès qu'on se prend à la lecture et à la destruction de Zind ou des Dominateurs, le parallélisme avec des choses qui sont arrivées il y a moins de soixante ans me sont revenues, surtout qu'il est très difficile de comprendre qui est Zind, et qui sont les Dominateurs.
Donc dérangeant, oui. Etrange, fatiguant et écoeurant de par le rappel incessant des mots comme "pur", "race" et de l'idéologie nazie. Mais, en même temps, c'est extrêmement intéressant de voir comment Spinrad a pu "assimiler" les idées de Hitler pour les retranscrire dans cette oeuvre où tout ça doit transparaître. J'avoue être impressionné par le travail sur lui qu'il a dû faire pour comprendre et assimilier tout ça pour pouvoir les recracher dans Le Seigneur du Svastika, de façon à ce que le lecteur puisse bien se dire que ça aurait pu être fait par Hitler ainsi.
Donc c'est dérangeant, oui, mais en même temps c'est extrêmement intéressant et impressionnant. Un véritable travail sur soi-même que je désire souligner ici.
En plus, Spinrad a poussé le "vice" à écrire d'une manière un peu simplette et dans un style pauvre. C'est souvent lourd, fatiguant, utilisant trop de fois les mots "race" et "pur", et démontrant un aspect étrange et vicieux pour les tenues en cuir et la violence. On retrouve évidemment ici les dogmes nazis dans les grandes démonstrations telles celles décrites dans le roman, et c'est encore une fois un travail impressionnant de Spinrad sur ça, étant donné que le monsieur est quand même un très bon auteur et qu'il sait faire mieux que "ça".
Mais il a fait "ça" exprès pour coller le plus possible à Hitler et à ses psychoses, et je le répète, mais c'est impressionnant.
De plus, la Préface apporte un éclaircissement très intéressant sur le pourquoi de l'écriture de ce livre, et la Postface est très intéressante aussi sur la vision de cet univers étrange et si différent du nôtre. Si Spinrad a écrit ça de lui-même (et je le pense, même si je n'ai pas confirmation), c'est aussi un travail très fun sur lui-même et sur son oeuvre : ça doit être quand même assez étrange et au fond sympa' de faire la critique de son propre bouquin, tout en lui trouvant des faiblesses.
Bien sûr, pour lui, c'est Hitler qui a écrit ce livre, mais c'est quand même assez fun, surtout que c'est très pertinent. Donc aussi un très bon point pour ça, encore une fois.
Au final, ça donne donc un roman extrêmement intéressant et passionnant. Le travail de Spinrad est bluffant et impressionnant, et je ne peux qu'applaudir ça. Une excellente lecture, donc, et un très bon livre contre les idéologies nazies. Excellent, tout simplement.